La défiance vis-à-vis des représentants politiques est aujourd’hui plus forte que jamais. Elle est paradoxale car les Français attendent globalement beaucoup de l’Etat tout en rejetant ceux qui l’incarnent après les avoir élus. Alors que la désespérance et le rejet du système menacent les fondements même du pacte républicain, il est urgent de redéfinir une règle du jeu commune, de nouvelles institutions plus équilibrées et plus responsabilisantes.
La situation de crise globale que nous connaissons n’est évidemment pas étrangère à ce phénomène. La fragilisation sociale qu’elle engendre suscite des peurs légitimes. Toute demande d’effort supplémentaire est acceptée si elle concerne le voisin plutôt que soi. La compétition se fait alors « vers le bas », en critiquant celui qui bénéficie de plus d’aides que soi tout en redoutant d’être relégué dans cette position. L’autre bouc-émissaire est donc le responsable politique. Cela s’explique bien dans la mesure où depuis 300 ans, la place de l’Etat n’a cessé de s’accroître souvent incarnée par un « homme providentiel » de Louis XIV à François Mitterrand en passant par Napoléon et De Gaulle.
Cette croyance collective en un homme tout-puissant est forcément porteuse de désillusions fortes. L’élection présidentielle au suffrage universelle a ainsi peu à peu tué le débat de fond pour se transformer en feuilleton médiatique et hystérique permanent. La presse accorde aujourd’hui la majorité de son temps à la vie privée du président, à son paraître et aux intentions de ses proches ou de ses rivaux en vue de l’élection présidentielle de 2017.
Nous devons en finir avec ce régime semi-monarchique pour revenir à la primauté du Parlement. Sans tomber dans les travers de la IVème République bien évidemment, mais avec des contre-pouvoirs forts et institués : une opposition parlementaire forte, une justice complètement indépendante, une presse détachée de l’influence des multinationales… Il est urgent d’insuffler plus d’éthique et de clarté à tous les échelons démocratiques. La meilleure reconnaissance du statut de l’élu doit aller de pair avec le nom-cumul (un seul mandat à la fois, pas plus d’un renouvellement possible). Les compétences des collectivités doivent être clarifiées pour que tous les citoyens évaluent clairement les responsabilités et les enjeux. L’imposition fiscale doit être complètement refondue pour plus de justice et de simplicité. La sécurité sociale doit être renforcée et le rôle des syndicats réaffirmer autour d’un nouveau pacte de santé et de prévention. Ces droits pourraient alors légitimement s’accompagner de devoirs nouveaux à définir. Le vote obligatoire, une adhésion syndicale liée à la sécurité sociale, la valorisation de l’engagement associatif seraient alors des pistes à suivre.
Nombreuses sont aujourd’hui les voix qui s’élèvent à gauche pour réclamer ce changement. Evidemment, nous ne serons pas d’accord sur tout. Mais donnons-nous les moyens d’un possible changement à l’horizon 2017, faisons-nous aussi le pari d’une constituante chargée de définir cette nouvelle règle du jeu. Les perspectives n’existent que si nous les provoquons. Les Français sont demandeurs pour peu qu’on aille jusqu’au bout et que l’on définisse ensemble un pacte plus juste où chacun puisse trouver sa place.
Romain LAVEAU, secrétaire départemental EELV49